Culture : Marion Chiron, le cœur accordéon

Elle a dit non au Cirque du Soleil mais elle a dit oui au Deux Sept pour une interview au long court.

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Pouvez-vous vous présenter ?

« Un gros exercice. OK, je m'appelle Marion Chiron, Je joue de l'accordéon et du bandonéon. Je viens d'Évreux et j’ai fait mes études d'horaires à Évreux. Je suis ensuite partie à Paris en classe aménagée, mais au lycée. Pour mes études supérieures, départ vers la Finlande et je suis de retour en France. J'habite Toulouse maintenant et je joue notamment l’orchestre de Bretagne, de Paris, le philharmonique de Radio France, l’orchestre du TNP mais aussi dans différents groupes de tango comme Les Fleures Noires avec 5 musiciennes Argentines et 5 autres Françaises, Tangomatàn, et Duo Chiron-Stromboni. En gros, c’est à peu près tout ! »

Ah oui quand même. Et quelle est votre actualité ?

« Avec Tangomatàn, nous sortons un 3e album, en février. On est passé par une case rock aussi avec Sanseverino, là, on s’est embarqué vers tango électro qui bouge pas mal. Et sinon, je suis directrice artistique d'un collectif et festival qui s'appelle Les Bouffées musicales. »

Êtes-vous issue d'une famille de musiciens ?

« Non, du tout, du tout. Mon papa était cheminot et ma maman comptable dans une école privée. Notre Dame de Saint-François à Évreux. »

Comment la musique est arrivée dans votre vie ?

« Eh bien, c'est mon papa et maman qui m'ont dit quand j'étais plus petite, j'avais huit ans. Ils m'ont dit : « Est-ce que tu ne voudrais pas commencer à jouer de la musique ? » Mon père m'avait dessiné une portée sur un papier, une portée. C'est les cinq lignes. Il m'avait dessiné une clé de sol. On avait commencé à faire des petits jeux autour de ça. Et ça m'avait bien plu. Et au Conservatoire, il y avait ce système du passeport musical. Les enfants doivent essayer un certain nombre d'instruments pour que tout le monde ne choisisse pas le piano, le violon ou la guitare. Et du coup, moi, j'avais choisi trompette, harpe et guitare et en fait, il manquait des cases à cocher. Il n’y avait personne dans la classe d'accordéon, parce que ça a quand même sa réputation un peu poussiéreuse. Du coup, on est allé un peu comme ça pour en finir avec ce processus. Et en fait, j'ai adoré. J'ai vraiment adoré. »

Un mot sur le conservatoire d'Évreux à Rayonnement Départemental ?

« On y passait vraiment plus de 12 h par semaine plus des soirées de cours. Pour moi, ça reste un lieu magique. C'est un lieu où on vivait entre nous, élèves de différents âges. L'ambiance était incroyable et on a réellement créé des familles de personnes. Et parce que la musique, c'était surtout ça, c'était de partager. »

Je me suis produit avec l'Orchestre de Paris. J'ai joué avec l'Orchestre de chambre du Luxembourg, l'Orchestre national de Bretagne et l'Orchestre philharmonique de Radio France.

Parlez-nous un peu de cet instrument, l’accordéon ?

« Je dirais que c'était stimulant, ce côté instrument qu’on n'aime pas. On est à deux mains séparées. C'était un peu mystérieux au départ. Et puis il y avait ce qui vibre vraiment contre soi. C'était vraiment contre la poitrine, contre le cœur. Et du coup, j’étais subjuguée. D’ailleurs, je ressens toujours cette sensation. »

À quel moment avez-vous réalisé que la musique, c'était vraiment du sérieux ? Qu'elle serait le moteur de votre vie ?

« Euh. Eh bien, je ne sais pas, même si la musique a pris une place importante, très, très vite. Mais le moment où je me suis dit tiens, je veux absolument, je veux en faire mon métier, c'était plutôt au lycée. De nouveaux en classes en horaires aménagés à Racine, à Paris. Par ailleurs, j’étudiais au conservatoire de Cergy. Puis, il y a eu la Finlande et l'Académie Sibelius.  J'avais rencontré un professeur de l’Académie qui était venu donner une master-class en France, dans notre école. Et c’est une rencontre. Et du coup, j’avais adoré ce qu’il avait proposé. Ça m’intéressait particulièrement le côté de partir à l’étranger. Le professeur m’a encouragé dans ce sens. Du coup, j’ai passé un concours. J’ai eu la chance et je suis partie pour cinq années d’étude supérieure en Finlande. »

Alors ?

« C'était génial. J'adorais ça. Ce n'était pas toujours simple. Les hivers, toujours autour du 15 décembre, je me disais mais « qu'est-ce que je fais là alors que pourtant j'adorais être en France avec ma famille et mes amis. » C'était un vivier de musiciens internationaux venant d’Europe, mais aussi des États-Unis, d'Amérique du Sud. C'était passionnant. Puis, on vivait vraiment ensemble. Donc c'était dans ce pays où le silence à une énorme place. Les Finlandais sont très, très discrets, toujours très présents. On était vraiment entre nous dans une nature magnifique. »

Quel fut la suite du voyage ?

« Après la Finlande. Et y a un passage à Paris, puis l’Argentine. »

Un passage obligé, l’Argentine ?

« En fait, on parlait tout le temps des musiciens argentins. Argentine, le monde du tango, le tango en soi. Nous, on connaît comme une danse ou une musique. Mais le tango, en fait, c'est une culture. Mais vraiment, quand quelqu'un se dit tanguero ou tanguera, c'est quelqu'un qui a vraiment qui vit avec la culture tango. Le tango, c'est sa culture. Il va dans des endroits où on entend du tango, il ne danse pas forcément ou il ne joue pas forcément, mais il respire tango. Aussi avais-je toujours eu ce fantasme et un peu l'idée de m’y rendre. Donc, je suis rentré de Finlande. Mais très vite, il y a eu la période de l'arrêt des spectacles par le Covid. Confinement. C'est parce qu'on nous a proposé une tournée, un groupe, Les Fleures Noires, après avec la sortie de notre album, que nous avons tourné là-bas. »

Est-ce facile de mélanger grands orchestres et projets personnels ?

« C’est très divertissant. On n’est pas dans la routine. Je me suis produit avec l'Orchestre de Paris. J'ai joué avec l'Orchestre de chambre du Luxembourg, l'Orchestre national de Bretagne et l'Orchestre philharmonique de Radio France. Jouer avec différents différents orchestres, c'est vraiment génial. Récemment, je me suis essayé à quelque chose de très différent avec la troupe dirigée par Jean Bellorini, qui est le directeur du Théâtre national populaire, qui est basé à Villeurbanne maintenant, un théâtre créé par Jean Vilar. En deux ans, on a fait deux projets ensemble. C'est une troupe magnifique. C'est un fonctionnement qui est différent de celui des orchestres et autres groupes de musique et musique et théâtre. »

Évoquons désormais Tangomotàn ?

« C'est un quatuor piano, contrebasse, violon et bandonéon. C'est un petit accordéon. On joue en bleu de travail parce qu'on essaie de faire référence à ce tango qui est né dans les conventillos, les cours d'immeubles où les ouvriers vivaient. Après leur journée de travail, ils dansaient entre hommes. Oui, il y a plein d'images graphiques, des dessins, des tableaux relatant cette époque. Avec Tangomoàan, on avait envie de revenir un peu à ces origines qui était un tango très enlevé, avec des percussions, avec des rythmes répétés. Nous nous éloignons du tango de salon. On a fait un premier album à quatre plus traditionnels, avec des compos à nous. Pour le deuxième album, nous avons travaillé avec Stéphane Sanseverino, le chanteur de chanson française, et son batteur Stéphane Mouchard, qui est son acolyte favori. C'était plutôt tango rock. Toujours en bleu de travail. Et voici qu’arrivera en février 2024 un nouvel effort. On est de nouveau en bleu de travail, mais un bleu "pimpé" par une costumière. Musicalement, nous changeons d’atmosphère avec un tango plus électro qui bouge pas mal. Sur scène, ça devrait donner aussi. »

Tangomotàn en vinyle : https://www.kisskissbankbank.com/fr/projects/nouvel-album-en-pre-vente/tabs/description

Tangomotàn sur scène : le 26 avril 2024 au Pan Piper à Paris : https://pan-piper.com/