Nature, Société : Gaspard Koenig : « Remettre le vivant au cœur du sujet »

Et si on se reparlait ? Philosophe passionné d’agronomie, Gaspard Koenig questionne nos rapports à la terre et au vivant dans ses derniers ouvrages. La tête dans les grands classiques de philosophie, les mains dans la terre, il prône une meilleure écoute entre différentes approches de l’agriculture.

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Philosophe, écrivain, Gaspard Koenig sera présent lors de l’événement agricole Fertiles, au Neubourg (Eure) le 26 septembre 2024. Alors qu’il s’apprête à publier le 2 octobre un traité d’Agrophilosophie (éd. de L’Observatoire) pour « relier la pensée et le sol » et « réconcilier nature et liberté », il a répondu au Deux Sept.  

Pourquoi avoir accepté d’intervenir lors de l’événement Fertiles ?

L’Eure m’évoque des souvenirs d’enfance : mes quatre grands-parents y ont habité, avant de « monter à Paris », comme beaucoup parmi leur génération. Et puis, Fertiles est un événement qui réunit des agriculteurs dans toute leur diversité. Pour moi qui porte un discours sur les questions agroécologiques, c’est intéressant de m’exposer à différentes réactions, différents points de vue, et d’avoir des discussions ouvertes et respectueuses sur ces sujets.

On oppose parfois agriculture « productiviste » et agroécologie. Qu’en pensez-vous ?

Je crois beaucoup au progrès et à la productivité : tout le monde veut être productif ! Toutefois, le progrès n’a pas le même sens aujourd’hui que dans les années 1970 avec la Révolution verte. La science agronomique de pointe évolue, et s’oriente vers des solutions agroécologiques, c’est-à-dire des réponses fondées sur le vivant plutôt que sur la chimie. Ça n’exclut pas les phytos ni la technologie, loin de là. Mais cela souligne que le cœur du sujet, ce sont les solutions fondées sur la nature, appropriées à chaque terroir spécifique, et qui prennent en compte la terre en tant que capital. S’il s’amoindrit, la productivité baisse.

Dans votre dernier roman, Humus (éd. de l’Observatoire, 2023), vous racontez le parcours de deux étudiants en agronomie : l’un fonde une start-up « verte », l’autre tente de restaurer les sols d’une ferme de manière plus « artisanale »... Pourquoi évoquer ces deux approches ?

Leur amitié est une parabole : est-ce que ces deux modèles de société sont compatibles ? Il est très difficile de ne pas être binaire dans notre société. Moi, j’écoute les mouvements écologistes radicaux quand ils disent qu’il faut remettre la science et le vivant au cœur du débat. Et j’écoute la finance régénérative qui aide les agriculteurs à financer la transition nécessaire. Et plus j’écoute les deux, moins je pense qu’ils sont incompatibles.

Infos pratiques
Fertiles est un événement d’envergure nationale, destiné à être un espace d’innovation et de dialogue pour imaginer l’agriculture de demain. Organisé par le Département de l’Eure, autour du thème de l’énergie verte, pour cette première édition du 26 septembre 2024, Fertiles s’adresse à ceux qui s’investissent dans l’avenir de notre agriculture et de notre planète, dans une approche inclusive et ouverte aux débats controversés.